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Tigre et Dragon : le contreOn l'a enfin vu Tigre et Dragon, et franchement ça fait un moment que je n'avais pas été aussi déçu, depuis MI-2 en fait. Un film de plus hélas à rajouter à la longue liste des ratages asiatiques produits par les américains, qui semblent décidément avoir le don de gâter un par un les plus talentueux cinéastes asiats de la planète. Bon, c'est vrai, on est loin du dernier "film" de John Woo, il y a quelques belles scènes. Les combats de Yuen Woo-Ping, assez nombreux et très inspirés, sont largement au-dessus de ceux de Matrix par exemple. Les acteurs, Chow Yun-Fat en tête, bougent vraiment très bien, et Yuen s'est de nouveau surpassé dans l'art de faire combattre des non-artistes martiaux sur un écran, c'est assez phénoménal, même pour ceux qui ont déjà vu Michelle Yeoh dans ses précédentes collaborations avec Yuen (Tai-chi Master, Wing Chun). Mais le reste ! Dès le départ on est étonné par le fait que les scènes dramatiques, habituellement le point fort d'Ang Lee (d'ailleurs il n'a fait que ça jusqu'à présent), sont ici ennuyeuses au possible, le contraste étant dès le début vraiment flagrant entre les combats déchaînés et la mise en scène statique et empesée pendant les dialogues, un académisme bon teint censé donner un ton noble et mythologique au film, mais qui rappelle hélas plus le Chen Kaïge de Adieu Ma Concubine ou la plupart des Zhang Yimou (choisissez votre titre favori) que les films HK. Mais il paraît que c'est ce qu'a voulu faire Ang Lee, filmer comme à Hong Kong les scènes de batailles comme des affrontements psychologiques et vice et versa. Eh bien selon moi c'est tout simplement raté. Mais ce n'est que la première partie et on attend avec impatience l'arrivée de quelques éléments dramatiques, qui, on l'espère, vont nous tirer de notre torpeur grandissante... Mais là aussi, quelque chose cloche : l'histoire avec la sorcière est assez ridicule (en plus pour revoir Cheng Peï-Peï aussi vieille et moche...), on ne comprend pas pourquoi ils vont se bastonner dans le parc la nuit venue (et pour cause on ne sait même pas qui sont ces gens) ; dans la salle les spectateurs (et moi aussi hélas) étaient morts de rire avec l'autre et son arme fichée dans le front, bien préparés il faut le dire par les scènes de vol des différents personnages (j'y reviens). Bon ça s'arrange un peu ensuite, quand l'histoire commence à être intéressante (les relations entre Michelle et Yi-Yi, l'annonce de son futur mariage...), mais catastrophe, voilà qu'arrive le flashback dans le désert avec son copain bandit ("Rends-moi mon peigne !", une future réplique culte de l'histoire du cinéma), VINGT minutes qui se voudraient sans doute épiques et émouvantes mais qui ne ressemblent à rien, ou pire encore, qui font clairement penser au Patient Anglais (pour ceux qui ont vu ce truc en entier) : désert et romantisme académique à deux sous, la rétérence absolue dans le genre. Ne riez pas, la scène dans la grotte à la fin, quand Yi-Yi arrive trop tard, est clairement empruntée au PATIENT, dont c'était le "climax" en quelque sorte. J'y avais pensé dès le flashback mais sans y croire vraiment, vous imaginez l'horreur à la fin quand j'ai vu que ce n'était pas une coïncidence (j'aime bien avoir raison mais là j'aurais vraiment aimé me tromper) ! De plus je venais
de subir la troisième partie du film, sans conteste la pire. Alors OK
ça bouge pas mal, ça déménage même très bien, mais problème, les combats
qu'on espérait sont complètement gratuits : la petite se cogne avec des
costauds dans l'auberge, divers combattants peut-être censés rappeler
des souvenirs aux fans que nous sommes : un moine shaolin, un combattant
avec un éventail, un autre avec des masses, mais ils sont surtout ridicules
(Ang Lee se fout clairement de leur apparence grotesque). De plus ils
avouent eux-même la gratuité de la scène, car ils ne souhaitaient qu'un
duel amical. Un duel amical ? Et pourquoi pas prendre le thé ! Et à ceux
qui prétendent que c'est une convention de se défier amicalement dans
les films de Hong Kong, je me demande où ils ont vu ça, même dans la fameuse
tétralogie des auberges de King Hu ils se tapent dessus pour de bon (les
faux-semblants, c'est AVANT l'action, chaque chose en son temps, comme
dans The Fate of Lee Khan par exemple). On l'aura compris, on n'a même pas besoin d'être un "intégriste" du ciné HK pour être déçu par ce film tellement il est mal construit et mal écrit, ne racontant rien d'autres que les sempiternelles histoires d'amour qu'on a déjà vu cent fois ailleurs, et en mieux, (y compris dans les précédents films d'Ang Lee, que j'aime beaucoup). En plus, franchement,
et je m'étonne que personne ne l'ai remarqué, cette petite peste qui vole,
trahit, ment, s'enfuit le jour de son mariage, fait tourner en bourrique
ceux qui veulent l'aider, les frappe en traître, moi elle a fini par me
taper sur le système. Et dire qu'il veulent tous se la faire : Chow, Michelle
Yeoh, le brigand des montagnes, son mari qu'on ne verra jamais, et pas
un, même pas Chow le super-guerrier-invincible-et-sage à la noix, n'ose
lui mettre une bonne paire de baffes pour qu'elle arrête de nous les briser.
On me dira que c'est un récit initiatique, qu'elle apprend ainsi à devenir
une femme moderne qui ne se laisse pas dominer par les hommes, et prend
son avenir en main, etc, etc... Mon oeil ! Ou alors la seule femme moderne
qu'elle incarne cette petite peste c'est la Lolita, qui revient très à
la mode en ce moment, un personnage sans aucun intérêt pour un film comme
celui-ci. Quant à l'utilisation des câbles je l'ai trouvée lamentable, d'accord ils volent très bien (je recommande la "marche arrière" sur vingt mètres dans la Cité Interdite, ou Chow qui décolle comme superman...) mais filmer ça frontalement, sans quasiment de montage, c'est presque comme laisser les câbles visibles. Même chez King Hu il y avait un découpage qui permettait le recours au hors-champ, à l'ellipse. Cette façon de TOUT montrer (qui a dit "typiquement américaine" ?) non seulement ne laisse pas place à l'imagination mais est absolument ridicule, un mot qui revient sans cesse à l'esprit tout au long de la vision du film. Le plus drôle c'est que le "grand public", qui ne connaît que de réputation le cinéma de Hong Kong, peut se dire en voyant ces images "c'est comme ça là-bas, il faut l'admettre, ça fait partie du jeu", tandis que ceux qui le connaissent un minimum se disent "mais c'est quoi ça, ils se moquent de nous ou quoi ?". Bon, c'est sûrement là le problème, ce film n'est qu'une vulgarisation (assez prétentieuse en plus) pour grand public (américain et européen, ne soyons pas sectaires) du cinéma de Hong Kong, comme l'était Adieu Ma Concubine pour les films du mainland. Mais ce n'est pas grave finalement, car ils arrivent bientôt, les vrais films asiats qui nous plaisent tant (In The Mood For Love, Gemini, les Ring... mais on les cassera aussi s'ils nous déçoivent 1), Tigre et Dragon n'était que le premier, car le plus abordable, d'une longue série. Tant mieux s'il apporte des spectateurs à ceux qui suivront, mais qu'on ne vienne pas nous dire que c'est un chef-d'oeuvre, ou même un bon film (2). Stéphane Pons 1-
mais comme ils sont tous les trois excellents on n'en dira que du bien
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